La chambre

Une nuit, 29 septembre 2003.

Les draps sont froids et collent un peu à ma peau à cause de l’alèse en plastique. Face à moi, près de la porte d’entrée, est accroché au mur un écran de télévision. À ma droite, une table de nuit et à ma gauche, un fauteuil. Il y a aussi une fenêtre au travers de laquelle je vois le ciel zébré par les branches d’un arbre. Je n’entends aucun bruit et savoure ce silence.

Ma fille Alice est née une heure plus tôt. Un accouchement sans péridurale. Elle est arrivée très vite, si puissamment, si violemment, que mon corps s’est recroquevillé. La sage-femme maintenait mes jambes ouvertes, tandis que je cherchais avec force à les refermer. Aveuglée par la douleur, sourde à ses encouragements, je hurlais qu’il m’était impossible de pousser. Je voulais disparaître, que tout cesse, puis tout a cessé.

La sage-femme a posé ma fille contre ma poitrine, que j’ai serrée dans mes bras. J’ai découvert son visage, touché délicatement ses pieds, pris sa main dans la mienne. Oli l’a coiffée d’un bonnet rouge à revers, le même avec lequel il avait coiffé notre aînée, puis elle a été emmenée pour ses premiers soins et sa première nuit sous la surveillance du personnel.

On m’a conduite dans cette chambre et la porte s’est refermée. Un havre de paix. Dans mon ventre flasque, quelques tensions sourdent encore, mais je sens mes muscles se détendre. Je reste éveillée à retenir la nuit par la fenêtre. Ne pas m’endormir, faire durer ce plaisir intense de la quiétude recouvrée.

Au petit matin, une sage-femme est entrée, poussant devant elle un berceau transparent. Ma fille. Notre premier jour ensemble.

Alice

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